La rédemption par l’alcool… Voilà le thème, surprenant, du dernier film
de Ken Loach, que je suis allée voir dimanche soir. Les critiques étaient
bonnes, le Prix du Jury l’a récompensé au dernier festival de Cannes, et l’on
sait que Loach a ses fidèles. J’ai néanmoins été quelque peu surprise par
l’impressionnante file d’attente qui m’attendait, avant de comprendre ma
méprise. Cet agglomérat humain ne concernait que la machine commerciale du
moment, The dark knight rises, le
dernier Batman. Le film de Ken Loach, lui, n’a attiré qu’une poignée de curieux
et nous nous sommes retrouvés dans une micro salle pour suivre les aventures de Robbie, jeune
délinquant condamné à 300 heures d’intérêt général après une agression. Je ne
sais pas ce que vaut Batman, mais je vous conseille vivement le film de Loach.
Le
cinéaste nous fait partager une tranche de vie de gamins miséreux, entre
violence et petits délits. Malgré
la dureté de leurs actes, l’on se prend de sympathie pour ces gosses de
Glasgow, pas gâtés mais qui tentent malgré tout de s’en sortir. Grâce à un
éducateur humaniste qui initie le groupe à l'art du whisky (nous sommes en
Écosse !), Robbie se découvre un vrai talent de « nez » et voit
se dessiner un avenir possible de goûteur de vin. Il participe à des séances de
dégustations, jusqu’à la mise aux enchères d’un nectar hors d’âge, vendu
plusieurs millions de livres. Notre
petit groupe décide alors de prélever sa part des anges et de la revendre à
prix d’or. Nos quatre compères voit dans cette dernière arnaque l'opportunité de redémarrer du bon pied grâce à la somme récoltée. En œnologie, la part des anges, désigne
le pourcentage d’alcool qui s’évapore durant son vieillissement en fût.
A 75 ans, inlassablement, Ken Loach dénonce encore
et toujours les injustices de notre société : Ce type qui peut mettre 1 million de livres pour s’acheter une
bouteille de whisky, d’où lui vient son argent ? Certainement pas d’un simple
travail salarié mais plutôt de l’exploitation d’autres travailleurs ou de la
manipulation financière. Quel est ce monde où se côtoient des riches
qui peuvent mettre autant d’argent dans un tonneau de whisky, aussi rare soit-il,
et des pauvres qui n’ont que la violence et la drogue pour point de
repère ? Le vol est-il la seule
option pour s’en sortir ? Vous en aurez une petite idée en allant voir le
film.
D’un drame social, Loach a fait une comédie. Une
fois n’est pas coutume pour ce cinéaste réputé sombre. Ce qui ne l’empêche pas de dire ce qu’il a à dire,
bien au contraire. Dans la droite lignée de The full monthy, son
dernier film est une critique acerbe d’une société écossaise dans laquelle le
taux de chômage des jeunes de 16 à 24 ans atteint 22.9%. Certains passages sont
poignants, comme celui où Robbie est confronté au jeune homme qu’il a
méchamment agressé alors qu’il était sous l’emprise de la drogue. Beaucoup
d’autres sont jubilatoires et l’on rit de bon cœur.
Ken Loach nous livre un film réaliste et sans concession. Pas
d’effets spéciaux, pas de filtres pour sublimer les paysages écossais, la vie à
l’état brut. Pour rester au plus près de la vérité, il a
sélectionné des acteurs qui ne sont pas des professionnels mais qui ont été
recrutés in situ dans la classe ouvrière et sans emploi de Glasgow. Loach leur donne,
non pas la totalité du script, mais uniquement les pages à jouer le jour même,
ce qui les empêche d’anticiper et de perdre leur spontanéité. L’interprétation n’en
est que plus juste. Paul Branigan, qui incarne Robbie, est d’un naturel
éloquent pour sa première apparition dans un long métrage. Il ne surjoue pas et
nous offre un très beau jeu. A noter aussi la belle performance de Gary
Maytland dans le rôle d’Albert, le simple d’esprit du groupe. Tout cela avec un
accent écossais à couper au couteau qui rend impossible de se passer des
sous-titres.
Bref, la part des anges, est une bonne cuvée Loach, à déguster sans
modération.
Vagabondage : Avez vous
entendu parler de cette initiative : Caroline, la cave vagabonde ? Il
s’agit d’une cave à vin à bord d’une péniche qui navigue entre la Bourgogne et
l’Ile de France. Elio, le capitaine, nous fait découvrir tout au long de ses
escales, des vins de l’Yonne issus de l’agriculture biologique. Un concept
très original que je n’ai pas encore testé et dont je vous invite à découvrir le
programme ici.
Des Racines et des ailes a
consacré à Caroline et à son capitaine un petit reportage :
A la tienne, Misty !
RépondreSupprimerTchin Anonyme :-)
SupprimerEncore un beau papier qui donne envie d'aller voir le film ! et j'adore entendre l'accent écossais même si je ne comprend pas grand chose !
RépondreSupprimerAlors là tu ne vas pas être déçue quant à l'accent ! Il est terrrrrrrible !
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