dimanche 15 juillet 2012

La mort s’invite à Pemberley (P.D. James)


Je dois m’excuser auprès de Jane Austen pour avoir impliqué sa bien-aimée Elizabeth dans une enquête pour meurtre, mais la fusion de mes deux passions (pour les romans de Jane Austen et pour l’écriture d’histoires de détective) m’a donné beaucoup de plaisir ce qui je l’espère sera partagé par mes lecteurs.
Pari gagné pour Phyllis Dortothy James, reine du polar de quatre vingt dix ans passés ! En tous cas pour moi, le plaisir fut bel et bien au rendez-vous. C’est pourtant avec un soupçon d’appréhension que j’ai abordée cette suite d’Orgueil et Préjugés. Admiratrice enthousiaste de l’œuvre de Jane Austen je craignais d’être déçue.


Six ans ont passé depuis le mariage de Darcy et d’Elizabeth. Nous sommes en 1805, à la veille du bal annuel organisé à Pemberley, le domaine des jeunes époux. Les préparatifs vont bon train et chacun s’active pour que la fête soit réussie, lorsque soudain Lydia, la sœur d’Elisabeth débarque, à bout de souffle, prétendant qu’un drame s’est joué dans les bois alentours entre son mari George Wickam et son meilleur ami le capitaine Dennis. Aussitôt, Darcy, suivi de deux de ses invités, le colonel Fitzwilliam et l’avocat Alveston, se mettent en route. Ils découvrent Denis, mort. A ses côtés Wickam, s’accuse du crime. Mais est-il vraiment coupable ?

L’histoire s’attarde d’avantage sur les coulisses du procès de Wickam que sur l’enquête policière elle-même. Ne vous attendez donc pas à un suspens insoutenable, ce qui n’empêche pas quelques rebondissements inattendus dans les derniers chapitres...
Il s’agit pour P.D. James de nous faire plonger dans l’atmosphère surannée de Pemberley, comme si nous y étions : tea time, ballades dans le parc, veillées auprès de la cheminée, déplacements à la bougie... Elle en profite au passage pour nous éclairer sur des faits qui n’étaient qu’esquissés dans le roman de Jane Austen. Ainsi, nous en apprenons d’avantage sur le passé de Darcy et sur son père, ou encore, sur les frasques de Wickam. C’est sans doute sa grande connaissance de Jane Austen et de son oeuvre qui permet à P.D. James de réussir cet exercice de style avec talent, sans qu’à aucun moment ne se trouve mise en doute la crédibilité de son histoire. Elle fait preuve d’imagination, tout en restant fidèle à l’univers austenien.

Les personnages d’O & P reprennent vie et la psychologie de chacun est respectée : Darcy, parfois arrogant, tourmenté par son passé, mais généreux et épris de justice, Wickam fourbe, profiteur et sans scrupule, Lydia hystérique et pathétique, et l’aimable Jane, lisse et transparente. Toutefois, dans mes souvenirs, Elisabeth m’apparaissait plus fougueuse et rayonnante. Désormais maîtresse du domaine de Pemberley et mère de famille, elle s’est rangée. Elle ne tient d’ailleurs pas le rôle principal dans l’intrigue. Même remarque pour Fitzwilliam moins flamboyant qu’en ma mémoire mais qui, ayant l’ambition d’épouser la sœur de Darcy, se montre plus mature.
Les personnages secondaires, la vie au domaine et toute sa domesticité,  sont pour l’auteure l’occasion de nous donner sa vision de la société de l’époque. Elle réussit même à introduire un nouveau personnage, dénommé Alveston, qui s’intègre parfaitement au décor.

Mention spéciale pour la traduction d’Odile Demange qui retranscrit le style littéraire particulièrement soigné de P.D. James et nous offre un réel plaisir de lecture : 
Il était de notoriété publique à Meryton que Miss Lizzie détestait Mr Darcy, un sentiment généralement partagé par les dames et les messieurs qui avaient assisté au premier bal auquel Mr Darcy avait accompagné Mr Bingley et les deux soeurs de celui-ci, et lors duquel il avait donné d'abondantes preuves de son orgueil et de son mépris arrogant pour la société, faisant clairement comprendre, malgré les encouragements de son ami Mr Bingley, qu'aucune jeune fille de l'assistance n'était digne d'être sa cavalière. De fait, lorsque Sir William Lucas lui avait présenté Elizabeth, Mr Darcy avait refusé de danser avec elle, déclarant ensuite à Mr Bingley qu'elle n'était pas assez jolie pour le tenter. On tenait pour admis qu'aucune femme ne saurait se féliciter de devenir Mrs Darcy car, comme l'avait fait remarquer Maria Lucas, « qui pourrait souhaiter prendre son petit-déjeuner pour le restant de ses jours devant visage aussi revêche ? »

Rassurez-vous : si vous n’avez pas lu Orgueil et Préjugés, P.D. James vole à votre secours dans un prologue fort habile. Et puis vous avez toutes les vacances pour vous rattraper.
Bref, un bon livre que je vous recommande vivement de mettre dans votre valise pour qu’un jour pluvieux ne soit pas un jour perdu.

Vagabondage :
Monsieur Darcy est sans conteste le personnage de Jane Austen qui aura suscité le plus d’émois auprès des lectrices d’O & P. Il est tellement emblématique qu’en 2001 Helen Fielding s'en inspire pour le personnage principal de son roman, Le journal de Bridget Jones, allant même jusqu'à lui donner le même nom, Marc Darcy! Mais pourquoi Monsieur Darcy est-il l’homme idéal ? Selon moi c’est parce qu’il joue sur la contradiction et  que nous les filles, finalement, on aime bien ça. Il semble indifférent voire arrogant mais derrière cette carapace se cache une âme sensible, peut être même blessée, qui ne demande qu’à être consolée (si, si, je vous assure). Il est tranché dans ses opinions, droit dans ses bottes, mais peut se laisser convaincre de changer d’avis. Il est fier et honnête mais tend toujours une main secourable à ses amis, même si ces derniers ont commis les pires méfaits. Et bien sûr, il est beau…et là il n’y aucune contradiction, il est juste beau ! D'ailleurs Colin Firth en est la parfaite incarnation dans la série sortie en 1995.


Je vous propose ce petit quizz afin de tester vos connaissances sur cet homme parfait. En dessous de 50 % de bonnes réponses, laissez votre place aux autres, ce gentleman n’est pas pour vous et il y a une sacrée file d’attente…Moi j'ai fait 100 %! C'est ici


La mort s’invite à Pemberley, P.P.James traduit de l’anglais par Odile Demange,
Fayard mai  2012

4 commentaires:

  1. Bonsoir Misty, C'est en rentrant d'une réunion ce soir que j'ai découvert ta critique du livre de PD.James. Moi aussi j'ai été charmée par l'histoire et le style de ce livre. J'avais en tête tous les personnages d'Orgueil et Préjugés. Ta critique est très bien faite. C'est vrai que PD a eu une excellente idée d'imaginer une suite au bouquin de Jane. On s'y croirait .... J'ai bloqué mon après-midi de mercredi pour voir sur Arte un téléfilm sur la vie de Jane Austen. Il y sera question du beau Monsieur Darcy qui a bien existé puisque dans la réalité elle a failli l'épouser. Merci également pour la très jolie photo du beau ténébreux .... Libellule

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    1. Ah je nesavais pas que Monsieur Darcy avait bien existé..il n'est donc pas qu'un idéal! C'est rassurant et plein d'espoir!Il a peut être des descendants.... Merci pour cette info capitale Libellule!

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  2. Ca y est ! lu !
    En partant en vacances, j'avais pris de la littérature adequate avec les lieux ... Donc j'ai relu "Orgueils et préjugés" à l'ombre des jardins anglais, pour enchaîner avec "la mort s'invite à Pemberley", toujours sous les arbres du Somerset.
    Vraiment j'ai eu l'impression de lire le même auteur, même si j'ai préféré PD James et la traduction parfaite qui donne de la modernité aux personnages.
    Alors oui ça ne se veut pas un polar tout en surprise et suspense mais c'est un merveilleux excercice de style et PD James maîtrise absolument tous les codes austeniens !
    Lire les 2 livres à la suitrte est un vrai régal et en plus sur les lieux de la vie de Darcy, c'est le comble du bonheur !
    Ah oui, je ne l'ai pas croisé .......
    Kate

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  3. Ah je suis bien contente que cela t'ait plu Kate! Quelle chance de l'avoir lu au pays même de Jane Austen. Dommage que tu n'aies pas croisé Darcy, il faudra donc que tu y retournes!

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