
Dés les premières pages, Yasmina Khadra donne le
ton. Le livre promet d’être d’une
noirceur extrême. Si l’on connaît le dénouement, cela ne nous empêche pas de
vibrer au rythme des aventures du héros. Bien au contraire, cela donne une
dimension encore plus dramatique au livre. Turambo est fait comme un rat et
malgré tous ses efforts, son destin est inéluctablement scellé.
Yasmina Khadra décrit une
Algérie d’entre deux guerres où le colons sont sans pitié, d’une violence
extrême dans les mots et dans les gestes. J’ai souvent été révoltée, écoeurée
et triste de lire une telle déchéance de l’âme humaine. Bien sûr, ça n’est pas
une révélation mais cet écrivain a le don de nous faire ressentir au centuple
ce que bien souvent l’on ne fait qu’effleurer : la cruauté des uns et la
souffrance des autres.
Son écriture est comme
d’habitude poignante, d’une justesse et d’une force qui font de lui l’un des
plus grands auteurs contemporains. Extraits :
Le mortel n’a qu’un seul domicile fixe : la
tombe. Vivant, rien n’est jamais acquis pour lui, ni maison ni patrie.
Hélas, aucun « si » n’a d’issue ;
pour preuve, il arrive toujours trop tard.
Le rêve est le tuteur du pauvre et son pourfendeur.
On ne se bat pas contre les journalistes. Ils
auront toujours le dernier mot puisque le dernier mot c’est eux.
Noir, sombre, lourd, ce livre est aussi un
formidable hymne à l’espoir.
Il y a toujours une vie après l’échec, la mort
seule est définitive.
Il n’y a qu’un seul choix qui compte : celui
de faire ce qui nous tient à cœur. Tous les autres ne sont que défections.
Malgré toutes les embuches
que rencontrent Turambo, jusqu’au bout, il voudra rester maître de son destin.
Certes il ne sait pas lire, mais il s’exprime avec son cœur. D’ailleurs le
livre est composé de quatre parties, chacune d’entre elles étant consacrée à
une femme que le jeune homme a aimée et qui le fera grandir jusqu'à devenir un homme. Inutile de savoir cogner pour cela.
Ames sensibles abstenez-vous. J’ai souvent eu la boule au ventre, et les larmes
aux yeux. Yasmina Khadra nous parle d’une période de notre histoire dont nous ne
sommes pas fiers; pire, qui est méconnue pour beaucoup d’entre nous. Il ne s'agit pas de s’auto-flageller pour des actes et décisions dont notre génération n’est pas responsable. Il est seulement question de mieux comprendre notre société car les séquelles
sont toujours présentes et expliquent sans doute bien des comportements.
Vagabondage :
Connaissez vous Reza ?
J’ai découvert ce photographe d'origine iranienne de manière tout à fait hasardeuse en surfant sur
la toile. En réalité je connaissais quelques unes de ses photos mais sans savoir qu'il en était l'auteur.
On sent à travers ses clichés une telle humanité que cela ne me surprend pas qu’à l’occasion du
cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie en 2012, Yasmina Khadra se soit
associé à lui pour publier un livre hommage
à son pays. En attendant de le trouver peut-être sous le sapin, je vous laisse
aller apprécier le travail remarquable de ce photographe ici.
Les anges meurent de nos
blessures, de Yasmina Khadra, paru aux éditions Julliard en août 20133
21€, ou 15,99€ sur Kindle
chez Amazon.fr
Très belle critique qui donne envie de lire ce livre et pour ma part de découvrir l'auteur.. et surtout gros coup de coeur pour Reza, ses photos m'ont touchées, merci pour cette belle découverte
RépondreSupprimerMerci Sabine! Je te conseille l'Attentat du même auteur, c'est un livre formidable!
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