
De cet artiste je connaissais surtout l’un des
personnages les plus marquants de sa carrière : Fritz The cat. Sans doute avez-vous déjà croisé ce chat paillard,
qui profite à fond de ce que la vie lui offre au cœur d’une Amérique à la recherche du bien être
et du confort, les valeurs premières de l’Américan way of life. J’avais
également en tête quelques images de femmes plantureuses, fessues et dominatrices,
autant dire flippantes !
Mais au fil des sept cents
planches exposées, j’ai découvert que l’œuvre de Crumb était autrement plus
fournie. Couverture de magazines, planches de BD, pages de carnets de croquis
jamais publiés et consultables sur tablettes numériques, pochettes de
disques…il y en a suffisamment pour se faire une idée de cet artiste hors du
commun. D’autant plus qu’il n’hésite pas à se mettre à nu dans ses dessins, relatant ses relations avec les femmes et sa vision (très) pessimiste et (très)
effrayante de l’homme moderne.
La rétrospective suit un déroulé chronologique et débute en pleine période hippie. Mister Natural, Fritz The Cat, Snoid, sont autant de (anti) héros étonnants qui permettent au dessinateur de dénoncer la désintégration sociale et morale de l’Amérique des années 60. Il avoue lui-même que son addiction au LSD n’est pas étrangère à cette vision du monde déjantée.
Entre 1979 et 2009, l’imagination
fertile de l’artiste ne faiblit pas. Entre autres personnages improbables, la
femme Yeti fait son apparition : un joli brin de fille, très, très poilue, poilue, mais pas moins coquette (vous noterez le noeud dans ses cheveux).
Il élève
également son épouse, Aline, qu'il surnomme « the bunch » (le p’tit lot),
au rang de ses héroïnes incontournables, en la prenant pour modèle.
En 1980, il
collabore avec Bukowski sur une série de comics. Et en 1993 il illustre
Kafka for beginners, une biographie de l’écrivain écrite par D.
Mairowitz.
Des pochettes de disques de
stars du rock ponctuent le parcours : The Grateful Dead, Janis Joplin, Deep
Purple, Bob Dylan, Neil Young, The Who....

Au bout du compte, j’ai
découvert un artiste complexe, qui
expose ses démons intérieurs. Le sexe,
l’amour, les femmes sont les thématiques récurrentes de l’œuvre de Crumb, au service de sa folie et de ses
nombreuses obsessions. Je ne suis pas restée indifférente à sa vision très
trash de la société et son humour singulier. Ses dessins bourrés de détails et la
virtuosité de son coup de crayon font de lui l’un des meilleurs dessinateurs au
monde.
J’ai eu cependant quelques regrets. Les planches ne peuvent que très rarement se
suffire à elles mêmes et il faut lire les textes pour comprendre l’absurdité ou
la drôlerie des histoires racontées. Et là est le hic. Tout est en anglais, les
traductions sont rares. Autant vous dire que si vous n’êtes pas « fluent »,
c’est la galère…
Autre bémol: on défile
dans des pièces dont les murs sont couverts de planches écrites en minuscules caractères! La salle exposant la Genèse donne même le vertige ! Si le but était de montrer la densité de l’œuvre de Crumb, banco ! Mais moi, ça m’a presque
découragée. J’ai cru que je n’arriverai pas au bout et, du coup, j’ai survolé beaucoup
de choses. Prévoyez donc une bonne paire de chaussures et une autre de
lunettes, car si vous voulez profiter de l’intégralité de l’exposition, il va
vous falloir passer beaucoup de temps au MAM.
Mais que cela ne freine pas votre envie d’aller découvrir
cet artiste à contre-courant, psychédélique, acide et subversif. Ne pas y aller serait se priver d’un moment avec
un dessinateur incontournable.
Vagabondage : En 1974, Ralph Bakshi a fait une adaptation de Fritz the Cat en
dessin animé. Mais Crumb, qui a considéré le résultat raté, n’a jamais voulu y
être associé. A tel point qu’après la sortie du film il a décidé de faire assassiner Fritz par une
autruche avec un pic à glace…Basic Instinct avant l’heure ?
Je vous laisse découvrir la bande-annonce :
Exposition Robert
Crumb : de l’Underground à la Génèse. Musee d’Art Moderne. Jusqu’au 19
août. Plein tarif : 8 €
je l'ai découvert à l'occasion de la sortie de la Génèse, Telerama avait eu la bonne idée pendant l'été de le mettre par petit épisode dans son journal, et j'avoue que j'attendais avec une certaine impatience le prochain numéro pour lire cette BD qui m'avait bien accrochée.
RépondreSupprimerJe ne connais pas le reste de son oeuvre, mais ça donne envie d'aller voir l'expo.
Tu es très prolifique en ce moment je trouve !
Ah Télérama , bonne source d'information :-) Oui si tu as l'occasion d'aller voir l'expo, tu verras, on en ressort pas indifférent.
SupprimerEt oui, il y a pas mal de choses à faire, voir, lire en ce moment, d'où ma production !
Difficile pour ceux qui ne matricent pas la langue de Fritz the Cat d'apprécier le vagabondage. Mais ça se laisse regarder quand mme... En tout cas, merci pour cette mise en valeur de l'expo, c'est très intéressant !
RépondreSupprimerMerci Lucie. C'est vrai qu'il aurait été bien d'avoir quelques sous titres pour le vagabondage mais les images sont assez éloquentes..;-)
SupprimerJe n'ai jamais pu Crumb .... je ne sais pas ça me déprime ... et pourtant je vis avec un fan absolu qui a toute son oeuvre mais non je ne peux pas. cela n'enlève pas son talent et sa folie, et il en faut !
RépondreSupprimerKate
Oui c'est vraiment très très spécial.....mais c'est surtout la découverte qui m'a plu car je ne connaissais pas bien cet artiste.
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